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MARIAGE, PACS, CONCUBINAGE : LES DIFFERENCES EN CAS DE DECES

Aujourd’hui la situation de couple ne se limite plus au cadre du mariage. Prenant acte de cette diversification des formes de conjugalité, le Code Civil consacre une place plus ou moins grande au statut du mariage, du Pacs et du concubinage.

Le concubinage est défini par l’article 515-8 du Code civil comme une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple.

Né en 1999, le pacte civil de solidarité (PACS) est de son côté un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune.

Quant au mariage, et jusqu’à la Loi 2013-404 du 17 mai 2013, il s’agissait d’une union stable entre un homme et une femme résultant d’une déclaration reçue en forme solennelle en vue de la création d’une famille. La nouvelle Loi a consacré le droit au mariage des personnes de même sexe.

Il résulte donc de ces définitions que ces différentes formes de conjugalité ne présentent pas la même nature, le mariage étant à la fois une institution et un contrat, le Pacs se limitant à l’aspect contractuel tandis que le concubinage relève uniquement de l’état de fait.

A ces différences de natures sont liées des statuts juridiques distincts.

Ainsi, si vous êtes marié, pacsé ou simple concubin, vos droits diffèrent en cas de décès de votre moitié.

Le mariage est synonyme de sécurité

Dans le cadre d’un mariage, le conjoint survivant a toujours vocation à recevoir une partie de la succession de son époux décédé, en plus des droits qu’il tire de son régime matrimonial.

En effet, et même sans disposition particulière pour assurer l’avenir du conjoint survivant, celui-ci ne se trouvera pas démuni. Il reçoit une part de succession du défunt, variable selon les héritiers en présence : quand le défunt laisse des enfants, si au moins un d’entre eux est né d’une union précédente, le conjoint survivant a droit à un quart de la succession.

Si les enfants sont communs, le survivant a le choix entre un quart de la succession ou l’usufruit de la totalité de celle-ci ; si le défunt n’avait pas d’enfants mais laisse ses deux parents, le conjoint survivant héritera de la moitié de la succession (si un seul parent est encore en vie, des trois quarts).

Avec une donation entre époux (donation au dernier vivant) ou un testament, les époux peuvent se transmettre une part plus importante de succession. Si le défunt laisse des enfants (nés ou non d’une précédente union), le veuf ou la veuve a droit : soit à la totalité de la succession en usufruit, soit à un quart de la succession en pleine propriété et aux trois quarts en usufruit, soit à la moitié de la succession en présence d’un enfant, le tiers avec deux enfants, le quart avec trois et plus.

L’union libre est synonyme de précarité

Les couples non mariés ne profitent pas de la même protection que les époux : le concubin survivant reste étranger à la succession du défunt, dont seule la famille hérite.

Sans testament, le concubin n’a aucun droit à la succession. Ainsi, celui-ci se trouve dépourvu :

– en matière de droit au logement : s’il appartenait au concubin décédé, le survivant n’a aucun droit car le concubin survivant ne bénéficie pas de la protection relative au logement. Bien plus, le concubin survivant, s’il n’est pas propriétaire, n’a même pas droit à un maintien temporaire dans le logement ;

– en cas d’acquisition en commun du logement : de leur vivant, les concubins étaient en indivision ; au décès, le survivant se retrouve en indivision avec les héritiers de l’autre concubin. Pour contourner cet obstacle, les deux concubins peuvent avoir prévu dans l’acte d’achat du logement une clause de rachat au profit du concubin survivant : sous réserve de désintéresser les héritiers, le survivant pourra ainsi acquérir la propriété totale du logement. Ils peuvent encore chacun léguer leur part à l’autre dans l’indivision ;

– en matière de bail :

* Soit le bail aura été signé par un seul d’entre eux, et l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit qu’en cas de décès du signataire du bail, son concubin a droit de se maintenir dans les lieux. Néanmoins, le transfert du bail au profit du survivant est possible à condition qu’il ait vécu dans le logement avec le défunt depuis au moins un an à la date du décès. A défaut, il ne peut pas rester dans les lieux, sauf accord du propriétaire. Il en va de même si le contrat de location datait de moins d’un an : la situation du concubin survivant est donc extrêmement précaire.

* Soit le bail aura été cosigné par les deux concubins, et si l’un disparaît, le survivant devient seul titulaire du bail, quelle que soit la durée du concubinage.

Lorsqu’on n’est pas marié, il est donc indispensable de prévoir l’avenir le plus tôt possible, sachant cependant que la fiscalité n’est guère incitative en cas de concubinage.

La seule solution est de prévoir un testament ou une donation, en prenant garde de ne pas léser les héritiers « officiels » du défunt et en respectant les règles de la réserve héréditaire et de la quotité disponible.

Mais le coût fiscal sera de toute façon très élevé pour le survivant qui devra s’acquitter des droits de succession.

Pacs, un testament est impératif

À la différence des conjoints mariés, les partenaires de Pacs ne sont pas héritiers l’un de l’autre.

Si l’un d’entre eux décède sans avoir fait de testament, ses biens vont à sa famille selon les règles légales, comme dans le concubinage.

Le partenaire survivant bénéficie toutefois de certains droits successoraux, telle que l’attribution du véhicule de son partenaire décédé (mais uniquement si le défunt l’a prévu par testament), si celui-ci lui est nécessaire pour les besoins de la vie courante ou l’exercice de sa profession, sous condition de l’absence de pluralité de demandes, où le juge sera chargé de trancher en fonction des intérêts en présence.

Le partenaire survivant dispose également de certains droits sur son logement :

– Le droit de jouissance temporaire sur le logement : au décès de son partenaire, le survivant bénéficie d’un droit de jouissance temporaire sur le logement qu’il occupe à titre de résidence principale à l’époque du décès et sur le mobilier qui s’y trouve (sauf testament contraire du défunt). Ce droit lui permet de se maintenir dans les lieux gratuitement pendant les douze mois consécutifs au décès, que le logement ait été acquis en indivision par les deux partenaires, qu’il appartienne exclusivement au défunt ou soit indivis entre lui et un tiers, ou bien encore qu’il soit loué.

Dans cette dernière hypothèse, et si contrat de bail était au seul nom du partenaire décédé, le contrat de location est transféré au survivant sans condition de durée du Pacs, mais en cas de demandes multiples, le juge se prononce en fonction des intérêts en présence.

En cas de bail au nom des deux partenaires, le contrat de location se poursuit au profit du partenaire survivant.

Que le bail soit au nom des deux partenaires ou d’un seul, le survivant a droit au remboursement des loyers pendant un an par la succession, sauf s’il en a été privé par testament.

Lorsque le logement était détenu en propriété, en indivision entre les deux partenaires, le survivant bénéficie du même droit de jouissance gratuite pendant un an. Lors des opérations de partage, il pourra demander l’attribution préférentielle du logement.

– L’attribution préférentielle du logement : le partenaire survivant peut se faire attribuer la propriété du logement qu’il occupe à l’époque du décès et de son mobilier lorsqu’il se retrouve en indivision avec les héritiers de son partenaire décédé. Cette attribution préférentielle est de droit pour le partenaire, mais seulement à la condition que le défunt l’ait prévue par testament. S’il ne l’a pas fait, et si l’un des héritiers du partenaire décédé demande également l’attribution préférentielle, c’est le juge qui tranchera.

En pratique, le partenaire survivant ne peut demander l’attribution préférentielle que :

* s’il dispose de droits en propriété sur le logement, ce qui suppose que le logement soit indivis entre les partenaires ;

* et s’il a les moyens de désintéresser les héritiers. Contrairement au conjoint survivant, il ne peut pas exiger de délais pour le paiement de la soulte.

Si le bien était indivis entre le partenaire décédé et un (ou plusieurs) tiers, le partenaire survivant bénéficie, sauf exception, du maintien dans les lieux pendant un an, l’indemnité d’occupation due au(x) tiers coïndivisaire(s) étant remboursée par la succession.

Passé ce délai de douze mois, le partenaire n’a aucun droit au maintien dans les lieux.

La loi offrant néanmoins peu de droits au survivant, les partenaires de Pacs ont tout intérêt à organiser eux-mêmes leur protection. Contrairement aux époux, ils ne bénéficient d’aucun outil spécifique de protection en cas de décès : il n’existe ni avantages matrimoniaux, ni donations au dernier vivant, ni quotité disponible spéciale entre partenaires.

Ils peuvent cependant mettre en œuvre d’autres moyens, avec un avantage essentiel sur les simples concubins : ils sont exonérés de toute taxation au décès.

Seul l’établissement d’un testament permet aux partenaires de Pacs d’hériter l’un de l’autre. Les possibilités de legs entre partenaires sont multiples, cependant l’option retenue dépendra de la situation personnelle des partenaires et notamment de l’étendue des droits que le testateur entend accorder au survivant, de l’existence ou non d’enfants, etc.

Cependant, de la même manière que pour les concubins, les règles successorales relatives à la réserve héréditaire (et au droit de retour des parents également) peuvent largement limiter les effets du testament fait au profit du partenaire survivant.

Par testament, le partenaire de Pacs peut recevoir : l’intégralité des biens du défunt, si ce dernier n’avait pas d’enfant ; la moitié de la succession s’il existe un enfant, un tiers avec deux enfants et un quart avec trois enfants et plus

Ainsi, la part qu’il est possible de transmettre au partenaire (comme au concubin par ailleurs) dépend éminemment de l’existence de descendants, héritiers réservataires. Une part minimum du patrimoine leur est obligatoirement réservée.

L’assurance-vie en cas de décès constitue également un bon moyen pour les partenaires de se transmettre un capital.

Quant à la protection sociale, le partenaire de pacs ou le concubin survivant n’ont pas le droit de toucher la pension de réversion après le décès de leur compagne ou de leur compagnon.

Héritage sans droits à payer pour les conjoints et partenaires de pacs

S’agissant du paiement de l’impôt sur la transmission du patrimoine, les règles diffèrent selon que le couple ait été marié, pacsé ou ait été dans une relation de concubinage.

Alors que le conjoint marié bénéficie d’une exonération de droit de succession et de donation, le concubin relève du taux le plus élevé pour les transmissions à titre gratuit : celui qui est prévu pour les personnes sans lien de parenté. La valeur de ce qu’il recevra, réduit de 1594€, sera taxée à 60%.

Par contre le PACS, s’il ne donne aucun droit de succession « automatique », du moins bénéficie-t-il d’une fiscalité plus attrayante puisque la loi a aligné en août 2007 la fiscalité applicable aux couples pacsés sur celle des couples mariés concernant les transmissions à titre gratuit, c’est-à-dire les transmissions par donation ou succession :

– les donations consenties au partenaire relèvent du tarif applicable aux époux et pour la perception des droits de donation, il est effectué un abattement de 80 724 € sur la part du partenaire lié au donateur par un PACS (cet abattement est remis en cause en cas de rupture du PACS au cours de l’année civile de sa conclusion ou de l’année suivante pour un motif autre que le mariage entre les partenaires ou le décès de l’un d’eux) ;

– le partenaire lié au défunt par un PACS est, comme le conjoint survivant, exonéré de droits de succession, quelle que soit l’antériorité du PACS (CGI, art. 796-0 bis).

Il est donc particulièrement intéressant de voir que les deux types d’union fondés sur un contrat (mariage ou le PACS) sont davantage protecteurs du conjoint survivant non marié. Ils permettent une transmission plus aisée du patrimoine.

Au contraire, le seul concubinage peut faire courir un risque au conjoint survivant non marié qui devra assurer les charges du ménage, qui peuvent être élevées en présence d’enfants, sans que ne lui soit dévolue une part dans la succession.

Au surplus, si une part lui est dévolue, il devra s’acquitter d’un impôt qui peut contribuer à accroître les problèmes du concubin non pacsé.

Ainsi, face à ce même risque du décès de l’autre, les conséquences, essentiellement pécuniaires, peuvent être désastreuses.

Quelle que soit donc votre situation, s’entourer des conseils d’un notaire revêt un intérêt tout particulier pour s’assurer que celui qui vous survivra sera protégé.

Me Adam DEBERNARDI, notaire