Intégrer une liste de mobilier dans une acquisition immobilière : une fausse bonne idée ?
La déduction du prix du mobilier du bien acquis est souvent présentée comme un bon moyen de réduire les « frais de notaire » lors de l’achat d’un bien immobilier.
Pour rappel, les frais d’acquisition payés au notaire sont composés pour la majeure partie de taxes (droits de mutation pour 6% environ du prix et taxe sur la valeur ajoutée). La rémunération du notaire ne représente qu’environ 1% du prix de vente.
Lorsque les parties décident d’intégrer la valeur du mobilier dans le prix de vente, la partie du prix correspondante à ce mobilier ne sera pas soumise aux droits de mutation.
Il peut donc paraitre séduisant de prime abord d’intégrer du mobilier pour réduire ses frais d’acquisition.
Toutefois, cette pratique peut s’avérer pénalisante.
Avant d’exposer les avantages et inconvénients, il faut revenir sur la définition de « mobilier ». Il s’agit des meubles meublants et objets de décoration et ou d’équipements vendus avec une maison ou un appartement (table, chaises, lit, matelas, électroménager…etc).
Ne peuvent être intégrés à cette liste, que les meubles qui peuvent être enlevés sans causer de dégâts au bien et qui ne lui sont pas indissociablement liés.
Par exemple, un radiateur ou une baignoire ne peuvent pas être intégrés dans la liste car ils sont attachés à l’immeuble.
Ensuite, la valorisation de ces meubles ne peut pas excéder 5 à 10 % du prix de vente.
Il est recommandé d’utiliser les factures et d’appliquer une décote par année de détention.
La liste du mobilier doit être ventilée article par article pour pouvoir être déduite. Chaque élément doit donc être valorisé indépendamment des autres.
Vous l’aurez compris, valoriser le mobilier permet de réduire les frais de notaire d’une somme d’environ 6% du mobilier.
Par exemple, pour un prix de 200 000 euros dont 5 000 euros de mobilier, les frais seront réduits de 300 €.
Intégrer une liste du mobilier vendu permet aussi à l’acquéreur de se ménager la preuve des meubles qui ne peuvent pas être emportés par le vendeur lors de son déménagement.
Toutefois, la valorisation de ce mobilier ne présente pas toujours un avantage.
- Premièrement, il y a toujours un risque de contestation de l’administration fiscale qui pourra réclamer les factures et estimer que la valorisation est trop élevée par rapport à la vétusté des meubles et réclamer les taxes, intérêts de retard et majoration lors d’un redressement.
- Deuxièmement, si à une époque les banques finançaient sans difficulté le mobilier, elles refusent aujourd’hui de l’intégrer dans le prêt immobilier, demandant aux acquéreurs de les financer avec leur apport personnel.
- Troisièmement, en cas de revente d’une résidence secondaire (la résidence principale n’est pas concernée), il n’est pas possible d’ajouter au prix de l’immeuble le prix des meubles pour le calcul de l’impôt sur la plus-value. Par exception, si les meubles sont récents et que le vendeur a conservé les factures, les meubles pourront être déduits en tenant compte de la vétusté (décote par année de détention).
Concrètement, si le prix d’achat de 200 000 € comprenait 5 000 € de mobilier, il ne sera tenu compte, pour le calcul de la plus-value, que de 195 000 € et le vendeur sera taxé à l’impôt sur la plus-value sur les 5 000 € de mobilier.
Pour résumer le mobilier est non déductible de la plus-value pour le vendeur et déductible des droits de mutation pour l’acquéreur.
Pour économiser 6%, l’acquéreur prend le risque de payer un impôt de 36,2% à la revente !
Enfin, du côté du vendeur, il n’y a pas d’avantage à intégrer du mobilier :
- La fraction du prix correspondant aux meubles ne se déduit pas de la base taxable à la plus-value immobilière (dans l’exemple cité plus haut, le vendeur ne pourra pas déduire les 5 000 € des 200 000 € du prix de vente pris en compte pour la plus-value),
- Si la valorisation dépasse la valeur vénale du mobilier vendu et que l’un des éléments tombe en panne avant la vente le vendeur devra le remplacer par un objet de valeur équivalente.
Ainsi si un four est estimé à 500 € alors qu’il est ancien et qu’il ne fonctionne plus avant la vente (et qu’il n’est pas réparable), le vendeur devra racheter un four ou le remplacer par un autre d’une valeur de 500 €.
Vous l’aurez compris, intégrer du mobilier dans une vente immobilière présente des avantages et des inconvénients à prendre en compte avant de s’engager ; n’hésitez pas à en parler à votre notaire, il sera là pour vous conseiller.
Me Carole OLIVIER-IMPERATRICE