Les réformes législatives et/ou réglementaires en matière d’urbanisme et d’environnement encouragent le renouvellement urbain, la densification, l’extension du bâti ou encore la surélévation. Cette évolution est indispensable pour éviter une consommation inutile de l’espace naturel ou agricole dont la destination doit être préservée pour les générations futures.
La réalisation de travaux sur un bâtiment existant se présente alors comme le moyen de répondre à ces attentes. Il s’agit de la liberté retrouvée de pouvoir faire évoluer sa maison au gré d’évènements professionnels ou familiaux.
Pour autant cette liberté demeure une liberté contrôlée à plusieurs niveaux : par l’autorité publique souvent ; par le voisinage parfois et par le notaire … toujours !
Alors avant de vous lancer dans vos projets, n’hésitez pas à recueillir l’avis d’un professionnel.
Agrandir sa maison, une liberté encadrée par la règle d’urbanisme
Le contrôle a priori par l’administration de la conformité du projet par rapport au règlement d’urbanisme (PLU, PLUi, POS, Carte communale, RNU…)
Les travaux sur existants sont par principe exemptés de toute autorisation sauf dispositions spécifiques prévues par le Code de l’Urbanisme aux articles R.421-14 à R 421-17-1.
Ainsi, dans les zones urbaines qui sont couvertes par un document d’urbanisme, la nature de l’autorisation dépendra de la surface de plancher créée. Un permis de construire sera prescrit pour toute extension supérieure à 40m² ou pour des extensions ayant pour objet de créer une emprise au sol ou une surface de plancher comprise entre 20 et 40m² si la surface totale de surface excède certains maximas. En dessous de ces seuils, et sauf cas particuliers, seule une simple déclaration de travaux sera a priori nécessaire.
Dans les zones non urbaines en revanche toute augmentation de la surface de plancher supérieure à 20m² supposera obligatoirement un permis de construire.
A l’inverse, et quelle que soit la zone concernée, les travaux portant modification des façades ou de l’aspect extérieur de l’immeuble ne supposent qu’une simple déclaration préalable de travaux sauf en cas de changement de destination (passage d’une destination commerciale à une destination d’habitation par exemple).
Par ailleurs en application de la jurisprudence administrative, il conviendra également de vérifier au préalable la situation du bien par rapport à la réglementation actuelle. Si un bâtiment existant est non conforme (par suite de l’évolution des règles d’urbanisme ou par suite du non-respect d’une règle à la construction), les travaux envisagés ne pourront être autorisés que s’ils rendent le bien plus conforme à la réglementation ou encore s’ils sont étrangers à la non-conformité.
Bon à savoir :
- L’évolution d’une annexe d’habitation telle que cave ou garage en habitation n’est soumise à aucun contrôle (si cette transformation n’est accompagnée d’aucuns travaux de structure ou de façade).
- Certaines dispositions spécifiques autorisent la dérogation aux règle fixées par le document d’urbanisme si le projet est particulièrement remarquable en matière d’économie d’énergie par exemple.
- Penser à établir les déclarations fiscales (formulaires H2 ou IL) en cas de travaux.
- Des travaux ne pourront être refusés sur un bâtiment non conforme mais légalement édifié il y a plus de dix ans uniquement si les travaux envisagés aggravent la non-conformité.
Agrandir sa maison, une liberté parfois entravée par la règle de droit privé
Un contrôle souvent a posteriori aux conséquences parfois dramatiques
Vous sortez du service de l’urbanisme le sourire aux lèvres, votre projet va être accepté.
Attention, quelques vérifications s’imposent.
La simple autorisation d’urbanisme ne constitue pas un blanc-seing vous autorisant à démarrer les travaux d’extension ou de transformation de votre maison. Outre le contrôle par les tiers de la légalité de l’autorisation à l’occasion du « recours des tiers » contre le permis de construire ou la déclaration préalable de travaux, la situation juridique de votre bien peut constituer un obstacle à la réalisation de votre projet.
- Le règlement du lotissement ou de copropriété
Pensez à consulter le cahier des charges du lotissement ou le règlement de copropriété dont dépend votre maison. En copropriété, le terrain constitue une partie commune sur laquelle chaque copropriétaire ne peut bénéficier que d’un droit de jouissance parfois exclusif. Ce simple droit de jouissance impose d’obtenir des autorisations pour réaliser des travaux d’extension ou des travaux modifiant la destination de l’ensemble immobilier. Certaines clauses ou dispositions de ces documents qui constituent la règle commune à plusieurs propriétaires, sont inviolables.
- La servitude de droit privé
Certaines charges peuvent grever la plénitude de votre droit de propriété, il s’agit de servitudes. Il pourra s’agir par exemple de l’interdiction de construire sur un certain périmètre ou encore d’élever au-dessus d’une certaine hauteur plus restrictive que celle prévue par la règle d’urbanisme. Ces servitudes sont généralement conférées au profit d’un autre terrain et cela indépendamment des changements successifs de propriétaires.
Dans ces situations et alors même que votre autorisation d’urbanisme est purgée de tous recours, un voisin pourrait vous opposer le non-respect d’une telle clause de droit privé pour obtenir l’interdiction de faire réaliser vos travaux ; voire leur démolition…
Bon à savoir :
- Certaines clause d’un lotissement peuvent disparaître par l’écoulement du temps
- Certaines servitudes qualifiées de non apparentes ne sont pas opposables au tiers de bonne foi en cas de non transcription au service de la publicité foncière.
- « L’erreur commune ne fait pas le droit » : la simple circonstance qu’un voisin ait pu à un moment réaliser des travaux sans l’autorisation de la copropriété, en violation d’un cahier des charges ou d’une servitude de droit privé ne vous autorise pas à vous exonérer du respect de la règle.
Agrandir sa maison, une liberté surveillée lors de la revente du bien
Le contrôle systématique du notaire, seul garant de la sécurité juridique de son acte
La réalisation de travaux sur existants peut constituer à bien des égards un obstacle lors de la revente d’un bien. Il appartient au notaire de vérifier la correspondance entre la chose vendue et la désignation du bien dans le titre de propriété antérieure ou au permis de construire. A cet égard il interroge le vendeur sur l’existence de travaux sur le bien vendu.
Pourquoi ?
Car la réalisation de travaux en infraction avec les règles d’urbanisme ou les règles de droit privé peut avoir des conséquences sur la transaction. L’acquéreur doit être informé de la fragilité juridique du bien qu’il acquiert.
De la même façon la réalisation de travaux depuis moins de dix ans fait entrer de plein droit la vente dans le régime de la garantie des vices de construction.
- L’acquéreur pourra-t-il librement réaliser d’autres travaux sur le bien à l’avenir ?
- Pourra- t-il reconstruire le bien après sinistre à l’identique de ce qu’il a vu et visité ?
- Les constructions ont-elles été réalisées par une entreprise assurée en responsabilité civile décennale ?
- Pourra-t-il se retourner contre l’entreprise qui a fait les travaux ?
- Risquera-t-il une action en contestation ou en démolition de la part d’un voisin ou de la copropriété.
Il est certain que l’écoulement du temps permettra de purger la plupart des situations. Lorsque la construction est achevée depuis plus de 10 ans, une opposition ne peut plus être formulée sur le fondement d’une irrégularité de la construction initiale sauf cas limitativement prévus par la loi
Bon à savoir :
- Penser à conserver les autorisations d’urbanise sollicitées et le descriptif précis des travaux réalisés avec la date d’achèvement des travaux.
- Penser à conserver les factures des entreprises et demander leur attestation d’assurance responsabilité civile décennale.
Thomas PLOTTIN, notaire.
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