LA VENTE A L’EURO SYMBOLIQUE
En préambule, on rappellera que toutes les cessions immobilières, par une collectivité territoriale (de + de 2000 habitants), sont soumises à la consultation préalable de la Direction Immobilière de l’Etat (DIE) dès le premier euro et sans condition de montant.
La collectivité souhaite parfois céder son bien immobilier à un prix symbolique ou un prix bien inférieur à sa valeur vénale (notamment celle déterminée par la DIE).
I) Vente à l’euro symbolique : le principe
D’une façon générale, les biens composant le domaine privé des collectivités locales ne peuvent pas faire l’objet d’aliénations à l’euro symbolique ou à un prix inférieur à leur valeur, en raison du principe qui interdit aux personnes publiques de faire des libéralités aux particuliers.
Ce principe s’entend strictement. Cette interdiction concerne les seules cessions gratuites (ou à des conditions trop avantageuses) consenties au profit des personnes privées poursuivant des fins d’intérêt privé (Décision Cons. Constit. 25-26 juin 1986). Par ailleurs, ne sont prohibées que les libéralités stricto sensu, c’est-à-dire les cessions qui procèdent véritablement d’une intention libérale et sont consenties sans contrepartie aucune.
II) Vente à l’euro symbolique : les exceptions
Dès lors que la cession comporte une contrepartie pour la collectivité cédante (c’est-à-dire une compensation pour la commune ou l’intérêt général dont elle a la charge), l’opération ne peut plus être assimilée à une libéralité et ne tombe plus sous le coup de l’interdiction ci-dessus rappelée.
Qu’est-ce qu’une contrepartie ? Il s’agira de déterminer les avantages que la cession est susceptible de procurer à la collectivité cédante, eu égard à l’ensemble des intérêts publics dont cette dernière a la charge, et de s’assurer, en tenant compte de la nature des contreparties et, le cas échéant, des obligations mises à la charge des cessionnaires, de leur effectivité.
Qu’en est–il dans le secteur de l’intervention économique ?
Depuis le 1er janvier 2005 (date d’entrée en vigueur de la loi du 13 août 2004), les ventes de terrains nus ou aménagés aux entreprises sont soumises à la même réglementation que les ventes de bâtiments neufs ou rénovés, c’est-à-dire que le prix doit être calculé par référence aux conditions du marché, avec possibilité toutefois de consentir, dans certaines zones, des rabais selon des conditions précisées par décret en Conseil d’Etat (CGCT, art. L.1511-3 et art. R. 1511-4 et s.).
Cette évolution législative met donc fin à la jurisprudence dite « Commune de Fougerolles » (Conseil d’Etat, 3 novembre 1997) qui validait les ventes de terrain, par une collectivité territoriale au profit d’une entreprise, à l’euro symbolique ou à un prix inférieur à leur valeur mais avec des contreparties suffisantes.
Mais un arrêt du CE « Commune de Mer » en date du 25 novembre 2009 a ravivé les débats. Le CE a jugé qu’une collectivité locale pouvait légalement céder à une association un bien immobilier pour un prix inférieur à sa valeur « dès lors que cette cession était justifiée par des motifs d’intérêt général et comportait des contreparties suffisantes ».
Toutefois, à ce jour, le juge administratif ne s’est pas encore prononcé sur les cessions, au profit des entreprises, de biens appartenant à une personne publique à un prix inférieur aux conditions du marché.
En revanche, en droit communautaire, la réponse paraît plus nette : une telle cession serait contraire aux régimes des aides économiques à l’immobilier d’entreprise.
Julien MINIO, notaire